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« Une clé pour des serrures invisibles »: Mandragore à l’espace Camac

Nous avons le plaisir de vous inviter au concert « Cordes de soie » de la harpiste voyageuse Mandragore. Mandragore nous emmène avec elle dans un fabuleux voyage, de la Bosnie jusqu’à l’Asie centrale, pour nous faire partager ses aventures, sa passion pour les musiques balkaniques et orientales, et sa passion pour la harpe. Avant son concert et atelier à l’Espace Camac, nous avons interrogé Mandragore sur son histoire, ses recherches minutieuses et quelques aventures bien réelles !

 

  Mandragore and her Aziliz  

Vous êtes une vraie voyageuse ! Cela a-t-il toujours été important pour vous, en tant que musicienne, de pouvoir vous déplacer librement à travers le monde – malgré le fait que votre instrument soit la harpe ?

J’ai hérité d’un certain goût du voyage de mes parents, mais c’est beaucoup la musique qui m’a poussée à voyager car j’ai depuis assez jeune un goût prononcé pour les musiques traditionnelles du monde.

Mais il y a eu une expérience fondatrice lorsqu’à 25 ans j’ai eu la chance de partir jouer à Gorazde, en Bosnie (une petite ville qui avait énormément souffert de la guerre en Yougoslavie). Là-bas, lorsque j’ai pu vivre l’expérience d’avoir mon instrument avec moi en voyage et ce qu’il pouvait provoquer dans mes rencontres avec les gens m’a donné envie de trouver des solutions pour voyager avec elle (la camionnette aménagée, notamment, la solidarité internationale entre harpiste parfois).

 

 

Et puis les musiciens qui voyagent le savent bien, être privé de son instrument dans des moments où on vit des expériences sensibles nouvelles, c’est toujours frustrant car dans ces moments-là, on a souvent de l’inspiration ou bien le besoin de traduire ses émotions par la musique, notre langue

Votre projet, Cordes de soie, est un concert conté (lié à votre album), il retrace vos aventures et nous fait entendre des airs et chants des Balkans jusqu’à l’Asie centrale.  C’est un voyage éclectique, en termes de pays, de genres et de styles ! Comment est née votre fascination pour la musique de la route de la soie ?

Dès les années 90, j’avais découvert certaines musiques proche et moyen-orientales via des disques de collection musicologique (Ocora notamment) mais c’est réellement en 2008 que j’ai rencontré ces musiques au cours d’un autre voyage fondateur le long de la route de la soie pendant 7 mois, que je raconte dans une bande dessinée « Ipak Yoli, route de soi(e) ». 

Au cours de ce voyage, moi et mon compagnon, avons enregistré plein de musiciens au fil de la route et de nos rencontres (bien aidé par la présence de ma harpe Aziliz que nous transportions dans notre camionnette). Des Balkans jusqu’à l’Asie centrale, j’y ai trouvé un univers musical nouveau pour moi, un monde où l’ex-empire Ottoman et l’ex-empire persan ont laissé leur marque et où la musique est principalement modale au contraire du fonctionnement harmonique de nos musiques occidentales. J’y ai trouvé une nouvelle voie pour approcher mon instrument et ma voix (car je suis surtout chanteuse-harpiste). Une approche où la recherche va plus vers l’ornementation, l’improvisation et la rythmique.

 

 

 

A l’occasion de ce concert, Mandragore propose également un atelier gratuit le samedi 23 novembre à partir de 14 h. Dans le cadre de votre atelier à Paris, vous parlerez du Cheng, un instrument régional. Comment vous êtes-vous intéressé à cet instrument ?

Le Cheng ou Chang est en fait un instrument qui a lui-même traversé la route de la soie car on en retrouve une cousine jusqu’au Japon (la kugo) et il a été très présent en Inde aussi (on en a plein de représentations dans des miniatures très anciennes). Moi je l’ai d’abord découvert dans les miniatures médiévales d’Ouzbekistan, qui faisait à l’époque partie de l’empire iranien, puis j’ai vu que la harpe était partout dans les représentations ottomanes jusqu’au 17e siècle. Mais une harpe angulaire à la forme inversée par rapport à notre modèle celtique. Puis en creusant, on arrive jusqu’aux représentations mésopotamiennes qui remontent à 2 millénaires avant J-C autour du royaume de Sumer.

Les musiciens turcs Şirin Pancaroğlu et Fikret Karakaya on fait tout un travail de recherche organologique pour faire revivre cet instrument.

 

Racontez-nous l’une de vos aventures préférées, en voyageant avec la harpe ?

Il y en a plein mais si je dois en choisir une, c’est celle du passage de la frontière iranienne. Il nous manquait un papier pour passer la frontière, un permis pour passer le camion qui nous empêchait d’entrer. Nous sommes restés 24 h au poste frontière où l’on nous proposait de payer 500 euros pour entrer le véhicule, somme bien trop chère pour nous.

Fatigués et déprimés, nous voyions arriver la faillite de notre voyage, prêt à laisser tomber.Mais… c’est compter sans l’importance de la musique en Iran, un pays que je vous souhaite de découvrir un jour.

 

Mandragore et sa harpe près de Sarakhs, à la frontière iranienne avec le Turkménistan.

Mandragore et sa harpe près de Sarakhs, à la frontière iranienne avec le Turkménistan.

 

Les gardes frontières savaient que j’étais harpiste, nous leur avions montré l’instrument.Après un semblant de nuit au poste, au matin, le chef des douanes m’a demandé si je pouvais jouer pour lui et ses collègues. J’ai répondu oui évidemment, même si j’étais très étonnée car en Iran, une femme n’a pas le droit de jouer de la musique seule devant des hommes (il doit y avoir un homme qui joue avec elle).

Le seul endroit tranquille pour jouer a été la chambre des coffre-forts, un lieu où on aurait même pas dû avoir le droit de rentrer, mais c’est là que j’ai fait mon petit concert, au milieu des douaniers fascinés.

À l’issue de cet impromptu, le douanier en chef nous a chuchoté un « 120 dollars ? », ce qui signifiait qu’il baissait la taxe de 500 euros à 120 dollars pour notre passage, soit à peu près 100 euros. Et c’est comme ça qu’on a fini par arriver à passer la frontière Iranienne.

Ce jour-là j’ai vraiment ressenti que la harpe était une clé pour ouvrir des serrures invisibles 

Veuillez noter qu’il est indispensable de réserver pour le concert (au profit de l’association 1%HARP) :

https ://my.weezevent.com/cordes-de-soie-mandragore-en-concert-a-lespace-camac

Adulte : 5 € / Moins de 18 ans : 2 € / Moins de 12 ans : gratuit

Pour réserver votre place pour l’atelier, cliquez sur le lien ci-dessous :

Gratuit – Sur réservation
Participant – Auditeur libre

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