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Siobhan Brady et le projet Highest Harp Project: Jouer de la harpe au-dessus des nuages

En 2018, Siobhan Brady avait déjà hérité du surnom de « harpiste la plus haute du monde ». Ce surnom est amusant, mais il est surtout bien mérité ! Le Guinness World Records a attesté que, lors de son concert dans l’Himalaya au profit de la mucoviscidose [Cystic Fibrosis Ireland], elle avait joué de la harpe à une altitude jamais atteinte. C’était à 4954 mètres d’altitude, le 6 septembre 2018, au col de Singla en Inde. Siobhan se souvient que « pour ce concert dans l’Himalaya, j’avais été invitée dans l’équipe par Desmond Gentle seulement quelques mois avant que nous nous envolions, donc une grande partie de l’organisation et des aspects en coulisses étaient déjà réglés. »

 

 

Siobhan Brady joue de la harpe au sommet du Kilimandjaro.

Siobhan Brady joue de la harpe au sommet du Kilimandjaro.

 

Après avoir réalisé cet exploit exceptionnel, on pourrait pardonner à Siobhan de se reposer sur ses lauriers, mais « Desmond a souhaité renouveler cette idée, cette fois sur le Kilimandjaro, pour récolter encore plus de fonds pour la mucoviscidose. Malheureusement, il est décédé peu après son retour à Londres. Mon père et moi avons décidé de réaliser ce rêve en sa mémoire. »

C’est ainsi qu’a commencé la quête pour battre son propre record, le projet reposant entièrement sur les épaules de Siobhan et celles de son père Sean pour ce qui concerne l’organisation: « Nous avons dû trouver des équipiers enthousiastes, des sponsors et des guides de montagne. Il nous a donc fallu environ deux ans de travail intense pour que tout se mette en place, mais à la fin, l’équipe de 19 personnes que nous avons réunie est honnêtement devenue comme une famille. »

L'équipe de Highest Harp, qui jubile à raison au sommet du Kilimandjaro.

L’équipe de Highest Harp, qui jubile à raison au sommet du Kilimandjaro.

Après ces années de travail, en juillet 2023, l’équipe s’est mise en route pour la Tanzanie afin d’y faire sa tentative. Naturellement, avec Siobhan en tant que détentrice du record existant, et en comptant avec le spectaculaire Kilimandjaro, le projet a reçu beaucoup d’intérêt : « Cette aventure a été très bien accueillie ! Je ne m’y attendais pas du tout. À l’atterrissage à l’aéroport du Kilimandjaro, des caméras de la presse nationale nous attendaient et une troupe de danse de l’université locale s’est produite pour nous. Avant de nous mettre en route, nous avons eu droit à une fête de bienvenue très particulière à Machame Gate. L’ambassadrice irlandaise en Tanzanie, Mary O’Neill, et le secrétaire permanent aux ressources naturelles et au tourisme de Tanzanie, Hassan Abbas, ont prononcé des discours pour nous en direct à la télévision nationale […] Lors de notre descente, nous avons été félicités par la présidente de Tanzanie, Samia Suluhu Hassan ».

Siobhan Brady avec Mary O'Neill, ambassadrice d'Irlande en Tanzanie

Siobhan Brady avec Mary O’Neill, ambassadrice d’Irlande en Tanzanie

Alors que le projet précédent se déroulait à une altitude d’un peu moins de 5000 mètres, le Kilimandjaro culmine à près de 6000 mètres, et ces mètres supplémentaires apportent un nouveau niveau de difficulté :  « Nous savions que l’ascension serait très difficile, mais se le dire est une chose, l’expérimenter en est une autre. Personnellement, j’ai eu le privilège de beaucoup m’entraîner dans une incroyable salle de sport dédiée à l’altitude à Dublin appelée Altipeak, et ils m’ont donné une tente pour dormir à une altitude simulée ainsi qu’une machine connectée à un masque pour que je puisse pratiquer la harpe dans ces conditions pendant des semaines avant de m’envoler.

Nous avions aussi avec nous l’incroyable Caroline Heffernan (atteinte de mucoviscidose), qui nous a enseigné des techniques de respiration pendant deux ans. Lorsque vous êtes dans une situation où l’oxygène est réduit, l’important est de ne pas paniquer. »

Siobhan Brady avec Caroline Hefferman, membre de l'équipe.

Siobhan Brady avec Caroline Hefferman, membre de l’équipe.

Bien évidemment, des éléments de la formation de musicien on pu s’appliquer ici : « Cela m’a rappelé un professeur de l’université qui demandait aux étudiants de monter des escaliers en courant, puis de jouer leur répertoire, de sorte qu’ils s’entraînaient à jouer en reproduisant le trac. »  

Si l’entraînement et la préparation mentale ont été essentiels, il semble que la présence d’une équipe très soudée ait été l’atout majeur de cette ascension :

« L’équipe qui m’accompagnait était tellement formidable, nous riions et chantions tout au long de l’ascension […] nous avons vécu nos moments les plus heureux aux heures des repas et nous avons préservé le moral de chacun, car vous ne saviez jamais quels membres de l’équipe rencontreraient des difficultés. Le quatrième jour, notre photographe, Stephen Lappin, a pris la décision de retourner à la base. Toute l’équipe était dévastée, mais nous avons compris que c’était pour le mieux. Des alpinistes meurent chaque année sur le Kilimandjaro parce qu’ils n’ont pas fait demi-tour quand il l’aurait fallu. »

Alors que Siobhan et son équipe entamaient l’approche finale, l’hostilité de l’environnement devenait de plus en plus évidente : « L’ascension du sommet a probablement été la journée la plus difficile pour la plupart du groupe. Nous nous sommes réveillés à 23 heures et avons commencé à marcher à minuit […] Tout le monde a ressenti le pire de l’altitude ici. Plusieurs personnes ont eu des hallucinations pendant la marche. Les maux de tête, vomissements, trébuchements et tremblements du corps étaient très fréquents. À 6 heures du matin, nous avons vu le magnifique spectacle du lever du soleil, ce qui signifiait que nous allions bientôt sentir la chaleur du soleil. Nous avons atteint le sommet (5895 mètres) à 8 heures du matin. » 

 

La harpe Janet arrive au sommet du Kilimandjaro.

La harpe Janet arrive au sommet du Kilimandjaro.

 

Non seulement Siobhan était arrivée en pleine forme, mais heureusement la harpe l’était aussi ! Siobhan se souvient : « Nous avons sorti la harpe [une Janet de Camac] de son flight-case personnalisé, et elle était parfaitement accordée !  […] Tout musicien connaît le souci de voyager avec son instrument, car il risque de se perdre ou même d’être endommagé. Le Kilimandjaro a cinq climats différents […] En l’espace de cinq jours, nous sommes passés d’une forêt tropicale chaude et humide à un glacier. Camac nous avait heureusement envoyé des cordes et des leviers de rechange, mais nous n’en avons pas eu besoin ! Ce qui était très bien du point de vue de la sécurité, car nous devions passer le moins de temps possible au sommet. »

Au moment de pouvoir enfin jouer le concert tant attendu dans un environnement sans pareil, les épreuves physiques et émotionnelles sont oubliées : « Le concert au sommet m’a fait l’effet du rêve le plus incroyable. Il n’avait pas du tout l’air réel […]. Les nuages étaient tellement loin en dessous de nous et un glacier derrière moi, c’était une vue magnifique. J’ai eu l’occasion d’ouvrir le concert avec Caroline Heffernan qui a lu un poème du président irlandais Michael D. Higgins. C’était un moment très émouvant car personne n’était sûr que Caroline atteindrait le sommet [en raison de son état de santé]. » »

« Le concert au sommet m'a fait l'effet du rêve le plus incroyable. Il n'avait pas du tout l'air réel »

« Le concert au sommet m’a fait l’effet du rêve le plus incroyable. Il n’avait pas du tout l’air réel »

Le moment le plus fort pour Siobhan a été l’interprétation de la chanson « Little Bird » d’Ed Sheeran (arrangement de Rory Moloney), jouée en mémoire de Triona Priestley : « En 2014, il y a eu une campagne pour qu’Ed Sheeran entre en contact avec Triona, atteinte de mucoviscidose. Lorsqu’elle était à l’hôpital, Ed l’a appelée au téléphone et lui a chanté sa chanson préférée. Il semblerait que la jeune Triona ait effectué sa dernière transition pendant la chanson de Sheeran. J’ai inclus cette chanson pour rendre hommage à Triona, mais aussi à toutes les personnes qui ont perdu leur combat face à la mucoviscidose. Cette association caritative mérite tellement d’être aidée et soutenue et je suis honorée de pouvoir aider à récolter des fonds. »

 

Comme on pouvait s’y attendre, Siobhan est loin d’en avoir terminé : « Pendant la marche, nous avions avec nous un caméraman, avec l’intention de réaliser un documentaire. Actuellement, je travaille dur pour faire de ce rêve une réalité. Cela implique de filmer des interviews et de travailler avec des sociétés de production, des monteurs et des réalisateurs. C’est une opportunité passionnante de faire l’expérience de l’industrie cinématographique et je n’aurais jamais pensé que c’est quelque chose qui pourrait arriver avec la harpe ! »

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