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Harfengalerie Camac Berlin, Vielsaitig auf Tour : les auditions d’orchestre, avec Petra van der Heide
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July 31, 2015
Das Orchester, la revue allemande consacrée aux métiers de l’orchestre (celle qui publie toutes les offres d’emploi) traite un sujet particulier dans chaque édition. L’édition du mois de mai titrait : “Beruf im Wandel: OrchestermusikerIn der Zukunft”, ou “Une profession en plein changement : les musiciens d’orchestre du futur”. L’intégralité du processus d’audition est étudié, ainsi que ce qui attend les orchestres financièrement parlant en 2015, et comment les étudiants des Conservatoires sont préparés à leur futur métier. Ces articles sont en allemand, mais on peut lire un résumé en anglais ici.
Par pure coïncidence, il se trouve que nous avons également pensé aux auditions d’orchestre en mai 2015. Nos partenaires allemands de la Harfengalerie Camac Berlin ont sponsorisé deux “Probespieltraining” (ateliers de préparation aux auditions d’orchestre) faisant partie du projet de la tournée Vielsaitig : le premier à Düsseldorf, le second à Rostock. Ces deux ateliers étaient menés par Petra van der Heide, harpiste du Royal Concertgebouw Amsterdam.
Une fois que vous faîtes partie d’un orchestre, vous pouvez vous investir dans une dynamique, dans une énergie, et dans le(s) rôle(s) de votre groupe ou orchestre au sein de la société. Mais pour obtenir un poste, il faut d’abord passer les auditions qui se présentent à vous. Et vous en passerez sûrement beaucoup ! En Allemagne, qui est de loin le pays où l’on trouve le plus de postes disponibles, un millier de diplômés plein d’espoir se battent chaque année, pour décrocher l’un des 150 postes ouverts. Ces concours d’orchestre ne sont pas particulièrement réputés pour offrir de merveilleuses conditions qui permettraient aux musiciens de se présenter sous leur meilleur jour… Il faut donc se préparer et s’entraîner sagement, inlassablement et courageusement.
Certaines personnes ont le pouvoir de changer les conditions parfois ubuesques dans lesquelles se déroulent les auditions. Thomas Bäurle, par exemple, du Staatsorchester de Stuttgart, a présenté une critique du système actuel au cours d’un symposium à Cologne (en janvier 2015). Mais pour tous ceux qui cherchent à travailler, il n’y a pas d’autre choix pour le moment que d’accepter de “faire avec”. Pas de “si”, pas de “mais”, pas de “j’aurais mieux joué si”, pas de “mais c’est impossible de bien jouer parce que” … Ce sont les mots de Petra Van der Heide aux étudiants de Düsseldorf et Rostock. “On vous fera jouer sur des harpes bizarres, des traits d’orchestre effectivement injouables sur de telles casseroles. Vous devrez jouer sans échauffement. Parfois, on vous donnera un instrument inutilisable, et/ou vous serez traité avec peu ou pas de respect. Si ça ne vous plait pas, allez-y, je vous en prie, râlez, bougez, et essayez de faire pression pour que les choses évoluent. J’espère que quand j’arriverai à l’âge de la retraite, j’aurai effectivement fait assez de bruit autour de ce sujet pour que le processus de sélection des auditions se soit amélioré. Mais pour l’instant, c’est comme ça, et mieux vous le comprendrez, mieux vous vous préparerez”.
Le programme des cours de Petra couvre un large spectre de sujets. Par exemple : quel répertoire préparer, comment le préparer et d’ailleurs, comment mettre la main sur ces extraits ? Parce qu’on ne peut simplement pas acheter la partie séparée de harpe pour les Actes I et III du Tannhäuser. La compilation d’extraits et de traits d’orchestres que tout bibliothécaire d’orchestre va vous dire d’utiliser, est pleine de fautes, et un chef d’orchestre se moque d’entendre que c’est ce que la documentaliste a donné ! Petra intègre fréquemment de fausses auditions dans ses cours, utilisant des harpes que les étudiants ne connaissent pas, leur interdisant de s’échauffer ne fut-ce que 5 minutes, pour apprendre à gérer ce genre de stress.
Nous n’avons pas forcément le pouvoir de faire entendre tous les “si” et les “mais”, depuis nos chaises isolées derrière l’écran, mais la communauté musicale (et nous en faisons tous partie) peut générer des changements positifs. Non seulement les concepts comme celui de Petra vous aideront à gérer les tenants et les aboutissants des diverses situations qu’on peut rencontrer, mais ils vous aideront à prendre conscience de ce qui vous attend. A juste titre, les étudiants insistent aujourd’hui auprès de leurs universités et conservatoires pour orienter davantage leur formation vers la préparation à leur futur métier. Il serait bon que les conservatoires et les associations professionnelles, et peut-être aussi l’Etat et les autres autorités financières, exercent davantage de pression sur les orchestres.
La compétition est cruelle, et aucun orchestre ne doit, ou ne peut donner, un emploi et un salaire à n’importe qui. Quoi qu’il en soit, il serait bon que les orchestres soient plus responsables et transparents quand on parle de procédures de recrutement, ce qui d’une part aiderait les musiciens à se préparer au mieux, et d’autre part permettrait aux orchestres d’attirer les meilleurs talents pour leur formation. Comparé au violon, flûte ou violoncelle, le monde de la harpe est tout petit. Nous avons pourtant largement notre compte d’expériences désastreuses et désagréables, et c’est surement la même chose, en cent fois pire, pour les grandes familles d’instruments. C’est particulièrement déprimant de constater qu’un poste reste vacant, parfois plusieurs années d’affilée, malgré le niveau d’excellence voire de perfection des candidats qui se présentent. C’est à se demander si l’on n’attend pas le Roi David en personne, ou s’il y a une raison de bloquer le poste…
En lisant Das Orchester de mai 2015, j’ai appris qu’une audition coûte en moyenne 17 000€, en services supplémentaires payés aux membres de l’orchestre (100 musiciens, et chacun est payé un service supplémentaire ou parfois deux, de 170€ en moyenne). Un orchestre de haut niveau peut aisément dépenser plusieurs fois cette somme. Lorque tout un orchestre souhaite recruter un collègue pour travailler ensemble avec une grande proximité, et ce pour les trente prochaines années, ce genre de décision ne se prend pas à la légère. Mais, avec un tel niveau d’exigence, est-ce normal qu’un orchestre dépense à plusieurs reprises plus de vingt mille euros d’argent public dans un concours sans engager personne, ou qu’il congédie les musiciens à la fin de leur période d’essai ? Et qu’on les laisse agir ainsi à plusieurs reprises sans que personne ne dise rien ?
A Cologne, en janvier 2015, Thomas Bäurle n’a reçu “ni approbation, ni démenti” pour sa critique sur les procédures standards de concours. Sven Scherz-Schade dans son article pour Das Orchester écrit : “Cette réaction neutre montre que toutes les personnes présentes ont compris le besoin d’agir, mais ne savent par où commencer”. Il n’y a pas que les candidats qu’il faudrait préparer pour ces auditions. Mais les candidats que j’ai rencontrés lors des master classes de Petra, est expert, clairvoyant, a les pieds sur terre, et nous montre à tous, spectateurs et étudiants, qu’il faut avoir une vision positive et maîtrisée de son futur. Si vous êtes intéressés par les formations que Petra propose pour les auditions d’orchestre, contactez-la via [email protected].